Si vous aussi vous ne savez pas faire la carpe (ou packing en anglais), ou si vous aussi vous pensiez connaître la technique de la carpe alors que vous exerciez une pression avec votre diaphragme, voici un tutoriel pour apprendre définitivement à faire la carpe !
Ah que c’est frustrant de voir ses collègues compétiteurs faire ce mouvement particulier pour emmagasiner plus d’air dans ses poumons, et de ne pas y arriver soi-même…
La carpe, quézako ?
Oui, pour rappel, la carpe c’est une technique d’aspiration de l’air, réalisée avec la mâchoire, les joues et la glotte, pour venir comprimer l’air dans les poumons (phénomène de succion).
Succion, vous avez dit succion ?
Les nourrissons, lorsqu’ils tètent le sein de leur mère, appliquent le réflexe de succion. Or nous avons tous été des bébés un jour, donc nous avons tous appliqué naturellement ce réflexe de succion. Donc nous avons tous au moins fait la carpe une fois dans notre vie ! Voilà qui est rassurant pour la suite !
La carpe, pour qui ?
Inutile d’apprendre la technique de la carpe si on fait 5min en apnée statique ou 150m en dynamique. Il y aura d’abord tellement de choses sur lesquelles se concentrer avant : le relâchement, la technique de nage, les virages, la lutte mentale, etc. Pourquoi la technique de la carpe ne devrait donc être utilisée que par peu de personnes ? Parce que si elle mal faite ou mal préparée , elle est dangereuse…
Technique de la carpe : les dangers
Il n’est pas naturel de comprimer l’air dans ses poumons. Ce phénomène n’existe nulle part ailleurs. Même en yoga, on n’utilise pas cette technique (le but est de ne jamais forcer en yoga…). Qui dit artificiel, dit dangers potentiels à la clé.
Rio Rösken, le responsable Science & Médecine de AIDA International, suivi de Rémy Dubern, nous avertissent des risques liés à la pratique de la carpe :
- possible passage d’air dans les artères (embolie gazeuse)
- possible passage d’air entre les poumons (pneumomédiastin)
- pneumothorax et saignements des poumons
Tous ces traumatismes peuvent être potentiellement mortels s’ils sont sous-estimés et mal traités. Les facteurs aggravants reconnus sont les postures augmentant la pression thoracique (étirements ou yoga après avoir carpé) et la combinaison d’un packing extrême avec certaines disciplines (poids constant sans palmes et dynamique sans palmes). Enfin, le bloodshift et / ou un baro-traumatisme des poumons réduisent physiquement le volume pulmonaire. Associés à des carpes, ils peuvent également affecter la pression pulmonaire après une plongée profonde.
Précautions à prendre si on veut apprendre à carper
« Chez Blue-Addiction (Rémy Dubern) , voici ce que nous ajouterions fort de notre expérience :
- Nous rappelons qu’il est totalement inutile de carper pour des plongées inférieures à 60m voir 70m. Avant d’utiliser ce bonus à double tranchant, préférez travailler technique, relaxation, bonne inspiration finale, mais surtout une technique de compensation précise.
- Si vous décidez de commencer à carper, il est important d’y préparer son corps progressivement. Nous sommes d’avis qu’entrainer ses poumons et la musculature de la cage thoracique va dans le sens de la sécurité lorsque c’est fait correctement et prudemment : exercices respiratoires 3 fois par semaine en période d’entrainement ou de compétition en prenant un soin absolu à n’augmenter le nombre de carpes que très très progressivement, de l’ordre de 1 à maximum 2 tous les 15 jours. Tout cela est au programme du cours AIDA 4.
- Des alvéoles trop étirées perdent leur élasticité, deviennent poreuse et se fragilisent à la longue, augmentant la sensibilité aux baro-traumatismes des poumons et embolies gazeuses.. Ne carpez jamais jusqu’à votre maximum. Un 60-70% est largement suffisant.
- Si vous pratiquez ces étirement, il est primordial pour votre sécurité de toujours inspirer et prendre la posture, PUIS seulement carper prudemment (si vous découvrez ces étirements, les pratiquer sur une simple inspiration à 80-90% sans carpes est suffisant au départ). Ainsi, si le moindre inconfort devait apparaître vous n’êtes pas en mouvement, et pouvez relâcher un peu d’air. Alors que si vous vous enflez puis commencez à bouger et vous étirer, vous risquez de vous blesser sans avertissement au moindre faux mouvement ou à la moindre carpe de trop. Rappelons que contrairement à nos muscles, les poumons contiennent très peu de détecteurs de douleur pour vous prévenir que vous êtes en train de les endommager. Il est donc facile de se blesser sans s’en apercevoir immédiatement.
- Pour l’apnée de profondeur, toujours expirer dans la dernière partie de la remontée : un peu dès 20m (pensez à prévenir l’apnéiste de sécurité, cela peut surprendre), et en tout cas sur les 10 derniers mètres. En effet, à la remontée l’air se décompresse dans les poumons plus vite que le bloodshift ne s’inverse, et donc dans un volume pulmonaire réduit, avec tous les risques de blessure que cela comporte.
Source : http://www.blue-addiction.com/packing
Apprendre la technique de la carpe : le tutoriel
C’est dans le livre de Federico Mana (Equalization for freediving) que j’ai appris ce tutoriel. Oui, parce que connaître la technique de la carpe aidera fortement à réaliser la technique de compensation de Frentzel… Bref, je vous recommande ce livre, c’est un must !
- Prendre une paille, un verre d’eau rempli, et son pince-nez
- Pince-nez sur le nez, gonfler ses poumons au maximum
- Plonger la paille dans le verre d’eau
- Amener la paille à la bouche
- Commence à aspirer l’eau par la paille et à la boire
- C’est bon, vous savez faire la carpe !
En fait, il faut repérer les gestes qu’on fait pour boire l’eau, notamment au niveau des joues, de la mâchoire, et de la glotte.
- Maintenant, essayer avec le pince-nez et avec la paille, mais sans le verre d’eau
- Maintenant, essayer avec le pince-nez toujours, mais sans la paille
- Maintenant essayer sans rien (voile du palais fermé donc)
- Sentir cette sensation de poumons qui s’élargissent.
Attention, les premières fois, ne pas faire trop de mouvements de carpe ! Monter progressivement : d’abord 5, puis 10, puis 15. Entre 15 et 20 carpes maximum, c’est ce qu’utilisent la plupart des apnéistes compétiteurs.
Ne jamais pratiquer la carpe seul(e), en piscine ou en mer : la sur-pression engendrée peut créer une perte de connaissance immédiate ! (avec risque de noyade si voies aériennes immergées…)