Si vous aussi vous ne savez pas faire la carpe (ou packing en anglais), ou si vous aussi vous pensiez connaître la technique de la carpe alors que vous exerciez une pression avec votre diaphragme, voici un tutoriel pour apprendre définitivement à faire la carpe !
Ah que c’est frustrant de voir ses collègues compétiteurs faire ce mouvement particulier pour emmagasiner plus d’air dans ses poumons, et de ne pas y arriver soi-même…
La carpe, quézako ?
Oui, pour rappel, la carpe c’est une technique d’aspiration de l’air, réalisée avec la mâchoire, les joues et la glotte, pour venir comprimer l’air dans les poumons (phénomène de succion).
Succion, vous avez dit succion ?
Les nourrissons, lorsqu’ils tètent le sein de leur mère, appliquent le réflexe de succion. Or nous avons tous été des bébés un jour, donc nous avons tous appliqué naturellement ce réflexe de succion. Donc nous avons tous au moins fait la carpe une fois dans notre vie ! Voilà qui est rassurant pour la suite !
La carpe, pour qui ?
Inutile d’apprendre la technique de la carpe si on fait 5min en apnée statique ou 150m en dynamique. Il y aura d’abord tellement de choses sur lesquelles se concentrer avant : le relâchement, la technique de nage, les virages, la lutte mentale, etc. Pourquoi la technique de la carpe ne devrait donc être utilisée que par peu de personnes ? Parce que si elle mal faite ou mal préparée , elle est dangereuse…
C’est l’apnéiste Stéphane Mifsud qui a largement contribué à la démocratisation de la technique de la carpe, technique employée notamment lors de son record d’apnée statique à 11.35min. Crédit photo : stephanemifsud.fr
Technique de la carpe : les dangers
Il n’est pas naturel de comprimer l’air dans ses poumons. Ce phénomène n’existe nulle part ailleurs. Même en yoga, on n’utilise pas cette technique (le but est de ne jamais forcer en yoga…). Qui dit artificiel, dit dangers potentiels à la clé.
Rio Rösken, le responsable Science & Médecine de AIDA International, suivi de Rémy Dubern, nous avertissent des risques liés à la pratique de la carpe :
possible passage d’air dans les artères (embolie gazeuse)
possible passage d’air entre les poumons (pneumomédiastin)
pneumothorax et saignements des poumons
Tous ces traumatismes peuvent être potentiellement mortels s’ils sont sous-estimés et mal traités. Les facteurs aggravants reconnus sont les postures augmentant la pression thoracique (étirements ou yoga après avoir carpé) et la combinaison d’un packing extrême avec certaines disciplines (poids constant sans palmes et dynamique sans palmes). Enfin, le bloodshift et / ou un baro-traumatisme des poumons réduisent physiquement le volume pulmonaire. Associés à des carpes, ils peuvent également affecter la pression pulmonaire après une plongée profonde.
Précautions à prendre si on veut apprendre à carper
« Chez Blue-Addiction (Rémy Dubern) , voici ce que nous ajouterions fort de notre expérience :
Nous rappelons qu’il est totalement inutile de carper pour des plongées inférieures à 60m voir 70m. Avant d’utiliser ce bonus à double tranchant, préférez travailler technique, relaxation, bonne inspiration finale, mais surtout une technique de compensation précise.
Si vous décidez de commencer à carper, il est important d’y préparer son corps progressivement. Nous sommes d’avis qu’entrainer ses poumons et la musculature de la cage thoracique va dans le sens de la sécurité lorsque c’est fait correctement et prudemment : exercices respiratoires 3 fois par semaine en période d’entrainement ou de compétition en prenant un soin absolu à n’augmenter le nombre de carpes que très très progressivement, de l’ordre de 1 à maximum 2 tous les 15 jours. Tout cela est au programme du cours AIDA 4.
Des alvéoles trop étirées perdent leur élasticité, deviennent poreuse et se fragilisent à la longue, augmentant la sensibilité aux baro-traumatismes des poumons et embolies gazeuses.. Ne carpez jamais jusqu’à votre maximum. Un 60-70% est largement suffisant.
Si vous pratiquez ces étirement, il est primordial pour votre sécurité de toujours inspirer et prendre la posture, PUIS seulement carper prudemment (si vous découvrez ces étirements, les pratiquer sur une simple inspiration à 80-90% sans carpes est suffisant au départ). Ainsi, si le moindre inconfort devait apparaître vous n’êtes pas en mouvement, et pouvez relâcher un peu d’air. Alors que si vous vous enflez puis commencez à bouger et vous étirer, vous risquez de vous blesser sans avertissement au moindre faux mouvement ou à la moindre carpe de trop. Rappelons que contrairement à nos muscles, les poumons contiennent très peu de détecteurs de douleur pour vous prévenir que vous êtes en train de les endommager. Il est donc facile de se blesser sans s’en apercevoir immédiatement.
Pour l’apnée de profondeur, toujours expirer dans la dernière partie de la remontée : un peu dès 20m (pensez à prévenir l’apnéiste de sécurité, cela peut surprendre), et en tout cas sur les 10 derniers mètres. En effet, à la remontée l’air se décompresse dans les poumons plus vite que le bloodshift ne s’inverse, et donc dans un volume pulmonaire réduit, avec tous les risques de blessure que cela comporte. Source : http://www.blue-addiction.com/packing
Apprendre la technique de la carpe : le tutoriel
C’est dans le livre de Federico Mana (Equalization for freediving) que j’ai appris ce tutoriel. Oui, parce que connaître la technique de la carpe aidera fortement à réaliser la technique de compensation de Frentzel… Bref, je vous recommande ce livre, c’est un must !
Prendre une paille, un verre d’eau rempli, et son pince-nez
Pince-nez sur le nez, gonfler ses poumons au maximum
Plonger la paille dans le verre d’eau
Amener la paille à la bouche
Commence à aspirer l’eau par la paille et à la boire
C’est bon, vous savez faire la carpe !
En fait, il faut repérer les gestes qu’on fait pour boire l’eau, notamment au niveau des joues, de la mâchoire, et de la glotte.
Maintenant, essayer avec le pince-nez et avec la paille, mais sans le verre d’eau
Maintenant, essayer avec le pince-nez toujours, mais sans la paille
Maintenant essayer sans rien (voile du palais fermé donc)
Sentir cette sensation de poumons qui s’élargissent.
Attention, les premières fois, ne pas faire trop de mouvements de carpe ! Monter progressivement : d’abord 5, puis 10, puis 15. Entre 15 et 20 carpes maximum, c’est ce qu’utilisent la plupart des apnéistes compétiteurs.
Ne jamais pratiquer la carpe seul(e), en piscine ou en mer : la sur-pression engendrée peut créer une perte de connaissance immédiate ! (avec risque de noyade si voies aériennes immergées…)
Un verre d’eau et une paille ? Oui, pour apprendre la carpe.
La question revient souvent : comment apprendre la nage ondulatoire ? Comment maîtriser ce geste si peu naturel qui consiste à onduler comme un dauphin, geste utilisé notamment en nage papillon, et en dynamique monopalme pour notre sport qu’est apnée ?
Ce matin, en farfouillant sur les réseaux sociaux, nous sommes tombés sur une vidéo très bien faite, publiée par Vladimir, de Dopamine.
Vladimir nous explique d’où part l’ondulation, quels sont les muscles qui entrent en jeu, quels exercices on peut pratiquer pour débuter et/ou se perfectionner.
Aussi bien valable en natation qu’en apnée, nous sommes certains que ces conseils permettront à tout un chacun d’améliorer sa technique de nage.
Pour les apnéistes désireux de s’améliorer en monopalme pour la discipline du Dynamique (DYN), on le répète, mais rien ne sert de travailler à l’entraînement en monopalme : des petites bi-palmes de natation feront parfaitement l’affaire, dans un premier temps…
Voici la vidéo, un grand merci à lui pour ces explications claires et précises ! 🙂
Jusqu’à il y a peu, la communauté des apnéistes connaissait Julie Gautier comme étant la compagne de Guillaume Néry et avec qui, ensemble, ils faisaient des films « engloutis ». Mais ça, c’était avant une collaboration dont nous avons déjà parlé ici ou là. Apnée Savoie a souhaité mettre le coup de projecteur sur Julie et son travail en tant que réalisatrice, voici son interview (english version at the end).
1. Julie Gautier, vos papiers s’il vous plaît ? 🙂 35 ans, née à la Réunion. Citation favorite : « La vie n’est pas un long fleuve tranquille, c’est un océan de possibilités. »
2. Si on revient 6 à 7 ans en arrière, quels films aimais-tu ? Quels réalisateurs ? Quels univers ? J’adore la science-fiction et les films un peu tordus comme « Mulholland drive » de David Lynch. J’aime Tim burton, Christopher Nolan, Danny Boyle, Terrence Malick. Je suis tombée récemment amoureuse du cinéma de Xavier Dolan aussi.
Mommy, l’un des films de Xavier Dolan. La scène culte, où le fils repousse les limites du cadre de l’image.
3. Tu réalises tes shootings en apnée. Pourquoi ce choix ? Est-ce que tu suis un entraînement sportif spécifique ? Je filme en apnée principalement parce que je n’aime pas la plongée bouteille, et en plus ça me donne une liberté bien supérieure, tout en ouvrant le champ des possibles en terme de cadrage. Sinon, pour ce qui est de l’entraînement, je chasse depuis toute petite, et j’ai fait de l’apnée en compétition, alors je surfe sur mes acquis !
Julie Gautier, réalisatrice, mais apnéiste avant tout !
4. Si on se concentre sur la période avant Free Fall, avais-tu déjà des idées précises en tête ? J’avais commencé à écrire le scénario de Narcose bien avant celui de Freefall, et c’est grace au succès de ce dernier que j’ai eu le cran de faire Narcose.
Guillaume Néry et Alice Modolo, deux apnéistes français pour le dernier clip de la chanteuse américaine Beyoncé. Guillaume Néry and Alice Modolo, two french freedivers for the last clip of the American singer Beyoncé.
L’interview de l’apnéiste Guillaume Néry (english version at the bottom)
1. Guillaume, tu as une actualité dense en ce moment, entre les Championnats du monde à Chypre, et cette très belle surprise avec Beyoncé. Tout d’abord, à froid, comment te sens-tu aujourd’hui par rapport à l’accident des -139m ? Cette semaine fut très riche en émotions. Je suis passé par tous les états. J’ai bien récupéré physiquement et mentalement de cette incident. J’ai pris beaucoup de recul et je me dis même aujourd’hui que cet incident m’a aidé à me conforter dans ma décision de mettre la compétition et les records de côté.
2. Alors ce clip Runnin’(Lose it all) avec Beyoncé et Naughty Boy, comment est-ce arrivé ? Comment « deux frenchies » se retrouvent approchés par la plus grande star de la pop américaine ? À la base, on a été contactés au printemps dernier par Charlie Robins, le co-réalisateur du clip. Il avait en tête une idée de clip sous-marin pour l’artiste Naughty Boy. Charlie nous a contacté après avoir vu notre dernier film Ocean Gravity et voulait vraiment collaboré avec nous. Il se trouve que Julie avait écrit depuis plusieurs mois un scénario très similaire à ces idées. Ils ont mis leurs idées en commun, et voila comment le projet est né.
« Puis nous avons eu la surprise au cours de l’été que Beyoncé allait être associée, peut-être, à cette chanson. Nous avons eu la confirmation, comme tout le monde il y a 2 jours en découvrant le teaser ! Quelle belle surprise ! »
L’équipe de production nous a totalement délégué l’organisation du tournage. Nous avons choisi de travailler avec Alice Modolo, notre amie et surtout qui, en plus d’être une championne d’apnée, avait déjà quelques expériences de tournage à son actif. Puis nous avons retravaillé avec notre chef opérateur Jacques Ballard, avec qui nous travaillons depuis 4 ans, et qui fut un acteur majeur de la réussite de Narcose. Enfin, nous avons choisi de travailler sur l’atoll de Rangiroa avec la même équipe que pour Ocean Gravity, le club Y AKA Plongée Rangiroa.
L’apnée profonde française a bien failli perdre son charismatique leader ce matin. Guillaume Néry, en pré-compétition pour les Championnats du monde AIDA en mer qui débutent demain à Chypre, a été victime d’une erreur humaine. Heureusement, tout est bien qui finit bien.
On dit souvent que les accidents les plus dramatiques sont une accumulation de facteurs. Ce matin, un seul facteur, une seule erreur a failli coûter très cher à Guillaume Néry. En 2015, comment est-il possible de se tromper de 10 mètres sur la longueur d’un câble ? Aberrant ! C’est pourtant ce qui est arrivé.
Guillaume Néry avait annoncé -129m, pour une tentative de record du monde en poids constant (CWT). Malheureusement, ce sont -139m qui l’attendaient au fond avec la plaquette. La faute à………..un morceau de scotch !
Parvenu à cette profondeur incroyable (13m de plus que son record personnel), Guillaume entame sa remontée. Sa lucidité ne durera malheureusement pas, puisque Guillaume n’a plus du tout de souvenirs de sa remontée, et ce jusqu’à ce qu’il soit placé sous oxygène sur le bateau. Tombé en syncope vers -15/-20m, ce sont les réflexes et les pulsions de vie de Guillaume qui lui ont permis de remonter de -139m. Sa participation pour ces Championnats du monde est évidemment annulée, mais avant tout, nous lui souhaitons désormais un prompt rétablissement auprès de siens.
Guillaume tombe en syncope après une apnée de plus de 3.50min. Crédit photo : Daan Verhoeven.
Nos confrères de France Apnée ont pu interviewer Guillaume Néry tout à l’heure, voici le début de l’interview :
► FRANCE APNEE : la première question est très simple : comment vas-tu ? Comment te sens-tu ?